Encyclopédie du Petit Peuple – Textes coupés

Dernière modification le 17 October 2020 par pafrancioso

   Par manque de place ou parce qu’ils ne convenaient pas à un large public, certains passages de l’Encyclopédie ne figurent pas dans le texte final. Comme ils ont été laissés de côté, je ne les ai pas forcément relus et corrigés avec autant de soin que les textes publiés, mais je trouvais intéressant de les exposer malgré tout.

   Pour les plus curieux (et ceux qui ont le cœur bien accroché), voici donc les morceaux coupés de l’Encyclopédie :


Un exemple de Nain connu :

     Rumplestiltskin

   Dans le conte des frères Grimm publié en 1812, Rumpelstilzchen en allemand, Rumplestiltskin en anglais ou le Nain Tracassin en français, est un Nain qui, ayant aidé une jeune fille à devenir reine, réclame son fils premier-né en retour. Il précise qu’il ne renoncera à ce tribut que si elle parvient à trouver son nom. Après plusieurs essais infructueux de la reine, le Nain, se croyant seul, chantonne en prononçant son propre nom ; un serviteur, qui l’a entendu, transmet l’information à la reine qui est ainsi libérée de son engagement. Ce genre de récit, dans lequel il s’agit d’obtenir le nom d’un personnage, est utilisé dans de nombreuses contes, comme ceux de Tom Tit Tot ou Trwtyn-Tratyn, par exemple.


Pour les Lutins et les Nutons :

     Lutteurs lutins

   Les origines du nom lutin ne sont pas claires. Au VIIème siècle, le neptunus apparaît dans une liste de démons ; ce terme donnera luitun en ancien français, transformé en lutin dès 1564. Collin de Plancy, dans son Dictionnaire Infernal (1825-1826), pense que c’est le mot lutte qui a donné leur nom à ces farceurs du Petit Peuple ; il pourrait aussi dériver du vieux français hutin, pour “bagarreur, entêté”. Les Lutins ont une grande force physique par rapport à leur taille, et certains d’entre eux n’hésitent pas à aller défier des créatures bien plus imposantes pour conquérir le cœur d’une belle humaine. Parmi eux le Lutin Jeannette prit, au XVIIIème siècle, la tête d’une troupe de bandits après avoir vaincu leur chef sans difficulté. Au bout de sept ans de mauvais coups, il dénonça finalement ses acolytes humains, les fit pendre et s’éprit d’une belle marquise, s’installant avec elle dans son manoir.

     Les Nutons

   Les Nutons belges (et les Sottai ou Sotês en Wallonie notamment) se rapprochent des Lutins mais, race à part entière, ce sont des artisans qui vivent dans des cavernes et réparent contre un peu de nourriture les objets cassés qu’on leur apporte. Selon Pierre Dubois, les discrets Nutons ont été victimes de l’intolérance des Hommes, qui se sont moqués de leurs principes et de leur attitude noble et les ont chassés tout en profitant le plus possible de leur nature serviable ; pacifiques, ils sont néanmoins capables d’inventer des machines de guerre – comme de puissantes arbalètes – si nécessaire. Les femmes repoussaient leurs élans amoureux en leur faisant manger des aliments leur donnant des gaz ; s’ils lâchaient des flatulences en public, trop honteux, ils ne réapparaissaient plus. Pour Edouard Brasey, les Nutons étaient susceptibles et capables de vengeance, pouvant par exemple ruiner un paysan qui se moquerait de leur manière de l’aider en ramassant le blé, épi par épi.


– Quelques détails sur le Leprechaun :

     Origine et apparence

   Nombreuses sont les régions d’Irlande qui ont développé leur propre vision du Lutin cordonnier ; on les retrouve souvent tous regroupés sous le nom du plus célèbre d’entre eux : le Leprechaun (prononcer “lépreucaune”, cette écriture faisant ressortir son suffixe commun avec son frère porté sur la boisson, le Cluricaune), originaire du nord de Leinster.

     My tailor is rich

   Le Leprechaun possède deux bourses : l’une avec une pièce magique d’un shilling qui se renouvelle dès qu’elle est utilisée – rappelant la bourse de Fortunatus de L’Étrange Histoire de Peter Schlemihl (1814) – et l’autre avec une pièce d’or factice qu’il donne à ceux qui voudraient le voler.


– Concernant les Folletti et Folletti del Vento, lutins italiens :

    Lubriques lutins latins

    En plus des étymologies citées (voir la page du Lutin), le mot lutin a également donné le verbe lutiner, c’est-à-dire taquiner à la manière d’un Lutin ; mais, selon le Petit Larousse Compact de 1993, ce verbe signifie “poursuivre (une femme) de ses baisers, de ses caresses”. L’espièglerie des Folletti, elle, vire même souvent à la lubricité à l’égard des femmes, des Fées, ou de toute autre espèce, imitant leurs ancêtres Incubes. Le Barabao de Venise se transforme en fil afin de se glisser dans le décolleté des femmes, ou dans les bidets pour scruter leur derrière. Le Massariol d’Italie du Nord se change lui en dessous ou en gant de toilette afin de caresser la peau des jeunes fermières en guise de rémunération pour ses travaux. Le Linchetto de Toscane, enfin, rendait impuissant les amants tout en inspirant des rêves érotiques aux femmes ; si le couple voulait s’ébattre en paix, l’astuce consistait à donner au Lutin un poil pubien – frisé et long – de madame, et de lui demander de le redresser avant le lever du jour, tâche impossible qui l’occupait toute la nuit. Quoique coquin, le Linchetto – comme la plupart des êtres de Féérie – n’apprécie pas les blagues graveleuses ou les allusions aux besoins naturels ; les Italiennes pouvaient donc le faire fuir, comme le Buffardello, le Caccavecchia et le Mazapegolo, en s’exposant assises sur des toilettes, engloutissant du fromage et s’exclamant : “Merde au Linchetto : je mange mon pain et mon fromage et lui chie à la figure”.


– Concernant le Kappa :

     Le saigneur de l’anal

   Comme de nombreux esprits des eaux – les Sirènes, Roussalki, Nekkers/Nixes et autres Näkki finlandais ou les chevaux Kelpies/Bäckahästen – le Kappa s’amuse à attirer les humains et les chevaux qui passent près de l’étendue humide qu’il hante, dans le but de les noyer. La Kappa échoue cependant fréquemment et, poli, il se met alors à rédiger une lettre d’excuses qu’il adresse à ses victimes ou à leurs propriétaires. Mais, s’il parvient à saisir sa proie comme il l’entend, il partira en quête de son shirikodama, une boule imaginaire qui se trouverait après l’ouverture de l’anus et qui, une fois écrasée, entraînerait la mort ; on raconte également que le Kappa extrairait par leur anus les organes internes de ses prises. Il lui arrive aussi de violer des femmes. Malgré son comportement déviant, ce monstre a été domestiqué, il sait se montrer utile et représente aujourd’hui l’un des symboles du Japon. Il est notamment utilisé comme métaphore du consommateur nippon.


– Pour les Changelins :

   Dans le paragraphe Hasta la vita, bébé, je mentionnais les auteurs des premiers textes (médiévaux) sur les Changelins : Gervais de Tilbury ou Raoul de Coggeshall, par exemple.

   De même, dans la partie Mais pourquoi sont-ils si méchants ?, j’expliquais que la théorie selon laquelle ces enlèvements de bébés était une nécessité pour les Fées apparaissait chez Katharine Briggs ; l’idée d’un échange entre deux cultures, elle, était présente chez l’elficologue Pierre Dubois.


   Un détail sur le classement des créatures, pour terminer : j’avais au départ rangé les Gnomes, les Gobelins et les Leprechauns parmi les Lutins de la Nature mais, afin d’équilibrer les différentes catégories, il a été décidé de rapprocher les premiers des Nains, et de placer les deux derniers dans les Lutins Domestiques.